L’ÉCO- CFA DE OUATTARA ET L’ÉCO DE LA CEDEAO EN GUERRE

Il y a donc désormais deux ECO. Le premier Eco est celui de la CEDEAO, initié en 2000, qui devait être lancé en 2003 suivant ce schéma : d’abord dans les 6 pays de la ZMAO (Nigeria, Sierra Leone, Liberia, Ghana, Gambie, Guinée), il devait ensuite s’étendre aux pays de l’UEMOA (Côte d’Ivoire, Mali, Benin, Burkina Faso, Niger, Guinée-Bissau, Sénégal et Togo). Après un premier report (2003), un deuxième (2005) et un troisième (2009), la CEDEAO a décidé en 2014 de supprimer l’étape intermédiaire et de lancer la monnaie en même temps pour tous les pays membres en 2020 et, dans le même temps, de créer une Banque centrale.

Le samedi 21 décembre 2019, les chefs d’Etat (ou leurs représentants) de CEDEAO se sont réunis à Abuja. La monnaie commune de l’Afrique de l’Ouest était au menu des échanges. Plusieurs résolutions ont été prises : le symbole de l’ECO a été adopté : EC ; le nom de la Banque centrale : Banque centrale de l’Afrique de l’ouest (BCAO). La CEDEAO a pris connaissance des réformes en cours dans la zone de l’UEMOA et a espéré qu’elles faciliteront l’intégration de l’UEMOA dans la future zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest (ECO).

Le même samedi 21 décembre 2019, Ouattara et Macron annonçaient à Abidjan que le franc CFA change de nom et devient l’Eco. Quel Eco donc ? Certainement pas l’Eco de la CEDEAO. C’est un autre ECO, l’Eco de Ouattara. Car la CEDEAO a été claire : l’UEMOA rejoindra l’ECO. Ce n’est pas la ZMAO qui rejoindra l’UEMOA. La CEDEAO continue à travailler en vue de sa monnaie commune et va ignorer royalement l’Eco de Ouattara.

Je dis bien l’Eco de Ouattara car au sein de l‘UEMOA, les chefs d’Etat ne sont pas unanimes sur la parité fixe avec l’Euro. Lisez le président burkinabé (2017) que je cite dans mon livre La guerre économique à la page 174 : pour lui, l’avènement de l’Eco de la CEDEAO « permettra de réaffirmer notre indépendance, d’avoir une politique monétaire propre à nous et non pas attelée à une autre monnaie telle que l’euro ».
Que s’est-il donc passé ? La France siège au comité de projet de l’Eco de la CEDEAO, invitée par l’UEMOA en tant que partenaire.

Lisez également ce qu’écrivent Ferdinand Bakoup et Daniel Ndoye dans leur livre Une monnaie commune pour l’Afrique de l’ouest : quand comment et pourquoi ? : « L’on peut donc s’attendre à ce que, a priori, la France souhaite réfléchir par deux fois avant de donner « sa » caution définitive à la création de la monnaie unique ouest-africaine. » Je les cite dans mon livre à la page 175.

SIMO DJOM MAURICE, Ph.D.
auteur de La guerre économique, Yaoundé, 2019, éd. Afrédit, 416pages.