Et si le meilleur moyen d’être performant au bureau était de varier les positions ? « La station assise prolongée ne favorise ni le dynamisme ni l’efficacité, affirme Odile Duchenne, directrice générale d’Actineo, observatoire de la qualité de vie au bureau. On l’accuse même d’être à l’origine d’une détérioration de la santé des salariés. » L’étude réalisée en 2008 par l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) fait en effet frémir : rester assis provoquerait des problèmes de digestion, des douleurs lombaires et une diminution des capacités respiratoires, entre autres joyeusetés. Mais la position verticale prolongée n’est pas non plus la panacée : elle présente autant d’inconvénients, voire plus, que la précédente.
Communiquer debout. L’idéal ? Changer régulièrement de posture. Ce qu’ont déjà compris les employeurs des pays du Nord. « Aux Pays-Bas et en Allemagne, chez Vodafone, Siemens ou Daimler, il y a déjà plus de vingt ans que la hauteur des tables est réglable », indique Thierry Coste, directeur consulting et services de Steelcase, spécialiste du mobilier et de l’aménagement des bureaux. Vous voulez passer un coup de téléphone ou tenir une réunion ? Elevez votre bureau à 1,20 mètre. « Debout, la communication est plus aisée, plus spontanée et donc plus efficace », explique Thierry Coste.
Prix à payer. Evidemment, ce confort a un coût : un bureau réglable coûte de 20 à 100% plus cher qu’une table fixe. Les entreprises installées en France rechignent à mettre la main au portefeuille. A quelques exceptions près. L’année dernière, la direction régionale d’Ile-de-France de Volkswagen est passée au mobilier réglable pour tous ses collaborateurs.
2. Pour mieux décider, think différent
Penser dans une langue étrangère améliore la capacité à prendre des décisions. Non, ce n’est pas le dernier slogan publicitaire du célébrissime Wall Street Institute, mais le résultat d’une expérience récente menée par la très sérieuse Chicago Booth School of Business. Des étudiants américains bilingues disposaient de 15 dollars qu’ils pouvaient consacrer à faire des paris. Ceux qui ont envisagé le problème dans leur langue natale ont été freinés par la peur de perdre leur argent : seuls 54% d’entre eux ont misé. En revanche, 71% de ceux à qui on avait dit de raisonner en espagnol ont tenté leur chance.
Même pas peur ! « Nous avons observé que les individus renoncent souvent à saisir une occasion en raison de leur aversion naturelle au risque, a déclaré Boaz Keysar, psychologue à l’Université de Chicago. Nos résultats ont démontré que cette aversion est largement réduite lorsque les gens prennent des décisions dans une langue étrangère. » Des conclusions confirmées par Christophe Haag, professeur à l’EMLyon Business School : « Notre vocabulaire est généralement moins riche dans une autre langue, et notre appréhension de tout ce qui nous entoure plus approximative. Nous ne nous embarrassons donc pas de broutilles. Notre cerveau va droit au but, il repère immédiatement les informations ou les éléments pertinents pour nous permettre de prendre rapidement la bonne décision. » Un argument supplémentaire pour vous inscrire à cette formation en anglais que vous ne cessez de repousser.
3. Réalisez un vieux rêve de gosse, écrivez sur les murs
Ces trois dernières années, lors du réaménagement de leurs locaux parisiens, les consultants d’Accenture ont vu apparaître une dizaine de salles de réunion, baptisées « propal rooms », d’un genre particulier. Fini, les séances soporifiques où l’on écoute passivement un intervenant commenter son diaporama. Avec le projecteur tactile, chacun peut intervenir directement sur les images projetées au mur. Les modifications sont aussitôt prises en compte par l’ordinateur. Comme le document d’origine est automatiquement modifié en conséquence, plus besoin, pour l’auteur des slides, de perdre du temps à reprendre, après la réunion, toutes les corrections apportées par les participants.
Mur à toucher. Cet appareil futuriste ne fonctionne évidemment qu’avec un écran tactile ad hoc et un stylo spécial. Lorsque, en 2008, Bill Gates avait fait la démonstration du prototype de son « Touch Wall » à l’occasion d’une grand-messe Microsoft, les observateurs, bien que bluffés, étaient restés sceptiques quant à une utilisation concrète par les entreprises. Aujourd’hui, de nombreuses marques se sont engouffrées dans le créneau.
Souplesse et réactivité. Développé par Epson, le projecteur utilisé par Accenture se révèle aujourd’hui un allié précieux pour les consultants habitués à manier un grand nombre de documents et de tableaux. « Les repérages, les corrections et les annotations s’en trouvent incroyablement facilités, constate Marc Thiollier, le DG France d’Accenture. On économise un temps fou, que l’on peut mettre à profit pour peaufiner les propositions des clients. Quant aux réunions elles-mêmes, elles ont gagné en souplesse et en réactivité puisque les participants peuvent se lever et apporter immédiatement des corrections. » Le succès des « propal rooms » est tel que l’entreprise prévoit d’en installer dans d’autres antennes françaises et européennes, comme à Sophia-Antipolis, Bruxelles et Amsterdam.
4. Mieux que l’open space, adoptez le bureau à ciel ouvert
Pourquoi la terrasse ou le jardin de votre entreprise seraient-ils réservés aux fumeurs ? Et si vous en faisiez une annexe de votre bureau ? Après tout, aucune loi n’interdit de vous y rendre pour y travailler au lieu d’y boire votre café. Vous pouvez terminer d’y rédiger tranquillement votre rapport sur votre ordinateur portable tout en restant joignable sur votre mobile.
Wi-Fi dans le jardin. Réservées aux salariés des start-up branchées, ces méthodes de travail ? Ce n’est pourtant pas vraiment le profil du Crédit agricole… En prenant ses quartiers à Montrouge, au sud de Paris, le groupe bancaire a décidé d’alimenter en Wi-Fi ses 4 hectares de jardin, afin que ses salariés puissent y travailler comme s’ils étaient à leur bureau. Des tables et des chaises complètent le dispositif. « De plus en plus d’entreprises intègrent désormais leurs espaces extérieurs dans leur projet d’aménagement des locaux, confirme Odile Duchenne, d’Actineo. Elles misent sur les terrasses, les cours intérieures ou les jardins pour créer un espace de travail plus convivial, favoriser le bien-être de leurs salariés et améliorer au bout du compte leur productivité. »
Chant des oiseaux. Naturellement, il faut apprendre à garder sa concentration dans un environnement qui invite plutôt à la rêverie. Employée au Crédit agricole Immobilier, Anne-Lise le reconnaît : « Au début, mon esprit avait tendance à vagabonder. Mais aujourd’hui, je ne suis pas plus dérangée par le chant des oiseaux que par les conversations de mes collègues dans les couloirs ! »
5. Trouvez des idées neuves en jouant aux chaises musicales
Coach et consultante rompue aux pratiques collaboratives, Agnès Avril-Conway est partie en guerre contre ces meetings interminables au cours desquels personne n’ose ouvrir la bouche par peur du regard des autres et qui, au final, ne débouchent sur rien de concret. Son idée consiste à animer des réunions en permutant régulièrement les participants. Un peu sur le mode d’un café convivial où chacun viendrait apporter son grain de sel, puis repartirait. « L’objectif est de faciliter les échanges et de multiplier les propositions », résume-t-elle. Le principe est simple : il s’agit de former des tables de quatre ou six personnes qui débattent d’un thème donné pendant vingt minutes. « Passé ce délai, tout le monde change de table. Sauf une personne, qui reste pour résumer la teneur des échanges aux nouveaux arrivants. Ces derniers enrichissent le débat à leur tour, complètent les idées évoquées au tour précédent, en donnent de nouvelles. » Ou comment transposer le jeu des chaises musicales au monde de l’entreprise.
Trois rounds. Le résultat ? Une variété des points de vue et une plus grande liberté d’expression : « Moins on est nombreux et plus on prend souvent et facilement la parole. » De cette manière, les discussions peuvent aussi adopter une tournure plus personnelle, ce qui apporte à chacun une meilleure connaissance des autres et permet ensuite de mieux travailler ensemble. Au bout du troisième round, chaque animateur de table fait une synthèse des propositions.
Inventer Mickey. En matière de brainstorming, Agnès Avril-Conway n’est pas la seule à qui les chaises ont donné des idées. Lorsqu’il était en panne d’inspiration, Walt Disney en plaçait trois devant lui. Il baptisait la première « chaise du rêveur », la seconde était celle du réaliste et la troisième, celle du critique. Il s’asseyait alternativement dans chacune d’elles et endossait le personnage correspondant afin de discuter avec lui-même : « Et si j’inventais une souris parlante ? – D’accord, mais par où commencer ? –Attention, le concept n’a-t-il pas déjà été utilisé ? » Aussi efficace à lui tout seul qu’une salle de réunion pleine à craquer !
6. Un petit problème à résoudre ? Utilisez les cerveaux disponibles
Chez Bonobo, une marque de jeans filiale du groupe Beaumanoir, lorsque les collaborateurs font une pause au milieu d’une réunion, ce n’est pas pour se la couler douce. Le directeur général, Yann Jaslet, a instauré un rituel bien rodé pour rentabiliser cette coupure : « Le collaborateur qui le souhaite peut alors exposer un problème qu’il rencontre, sans qu’il y ait forcément de rapport avec la réunion, afin que tous les autres lui indiquent des pistes possibles. » Mais n’imaginez pas que chacun réagisse et donne son idée de vive voix : la pause risquerait de s’éterniser. Personne ne parle. Les participants disposent de deux Post-it sur lesquels ils écrivent leur solution, qu’ils donnent au collaborateur. Et la réunion reprend comme si de rien n’était.
7. Pour bosser tranquille, choisissez l’écran total
Et si vous décidiez de vous barricader derrière un mur constitué de trois écrans d’ordinateurs ? Premier avantage : vous ne verrez plus la tête mal réveillée de votre collègue de bureau. Plus sérieusement, votre efficacité au travail s’en trouvera considérablement améliorée. C’est ce que révèle une expérience menée par le cabinet allemand Fraunhofer spécialisé dans les nouvelles technologies. Les participants ayant testé ce dispositif ont achevé leurs tâches plus rapidement et plus précisément que ceux qui ne disposaient que d’un seul écran. Leur productivité aurait même bondi de 35%.
Séparer les tâches. Ces chiffres n’étonnent pas Catherine Gall, directrice recherche et prospective chez Steelcase : « Travailler sur plusieurs écrans permet de mieux séparer les tâches. Le premier ordinateur peut par exemple afficher les données fixes (traitement de texte, tableaux), le deuxième, celles qui fluctuent (pages Internet) et le troisième, tout ce qui concerne l’administratif et l’emploi du temps (e-mails, carnet d’adresses, agenda). Compartimenter les opérations permet au cerveau de mieux traiter les informations. »
Frais d’ophtalmo. Fini, la déconcentration due à l’irruption d’un e-mail, les multiples applications et documents ouverts en même temps… Scientifiques, éditeurs, ingénieurs, financiers, assureurs, informaticiens : nombreux sont ceux qui y trouveraient leur compte. Reste à convaincre les employeurs d’investir. Et de participer aux frais d’ophtalmo que ces trois écrans devant les yeux ne manqueraient pas de provoquer.
8. E-mail addict, faites une cure de désintox
Ne plus trouver 500 e-mails dans votre boîte en revenant de trois jours de RTT vous soulagerait d’un gros poids ? « Pas si sûr, rétorque Cécile Demailly, créatrice de la société de conseil Early Strategies. Nous sommes de véritables accros au courrier électronique. Un utilisateur professionnel vérifierait ses messages entre 40 et 50 fois par heure ! » Selon une étude du cabinet Sciforma, nous sommes dérangés toutes les douze minutes environ par un e-mail. Quelques entreprises ont courageusement tenté de s’attaquer au problème afin de restaurer la productivité de leurs salariés. « Chaque trimestre, nous organisons une journée sans e-mail, explique Philippe Le Disert, DRH de Canon France. Les collaborateurs sont alors invités à décrocher leur téléphone ou à se déplacer pour rencontrer leurs interlocuteurs. »
Pari réussi : les journées sans courriel ont permis de diminuer de 20%, puis de 30%, le nombre de messages. « De l’avis général, tout le monde est plus concentré ce jour-là et fournit un travail bien plus approfondi », se félicite le DRH. Pour sa part, Thierry Breton, le patron de la SSII Atos, veut éradiquer les e-mails internes d’ici un ou deux ans : les collaborateurs de l’entreprise passeraient de cinq à vingt heures par semaine à en lire et en écrire. A terme, l’objectif est de se reporter sur les réseaux sociaux, les plateformes communautaires et les messageries instantanées.
9. L’addiction au mail persiste ? Soyez synthétique.
Devinette : qu’y a-t-il de pire qu’un courrier électronique ? Un long courrier électronique. Efforcez-vous de faire tenir le contenu de votre message dans la ligne « Objet » en une cinquantaine de caractères, pas plus. Un bon exercice de synthèse, et du temps gagné pour vos destinataires, qui n’ont même plus besoin d’ouvrir votre courrier pour en connaître la teneur. Et si vous êtes vraiment incapable de contenir votre verve, essayez au moins de ne pas entrer dans un dialogue « ping-pong ». « Pour cela, posez des questions fermées plutôt qu’ouvertes, conseille Cécile Demailly, chez Early Strategies. Préférez, par exemple, la formule “Pouvez-vous me répondre avant 16 heures” à “Quand pouvez-vous me répondre ?” »
10. En panne d’inspiration ? Condamnez-vous à l’isolement
Non, il ne s’agit pas d’une énième expérience de téléréalité mais d’une initiative d’Alcatel-Lucent pour stimuler la créativité de ses équipes. Il y a deux ans, plusieurs chercheurs et ingénieurs se sont plaints que les salles de réunions étaient inadaptées aux sessions de remue-méninges. « On nous demandait d’être originaux et innovants dans un univers qui nous rappelait les codes et les vieilles habitudes de l’entreprise », se souvient Fabrice Poussière, ingénieur en R&D.
Huit jours enfermé. C’est ainsi qu’est né le Créativ’Lab, au centre de Villarceaux (Essonne) : une immense salle de 100 mètres carrés où l’on trouve des poufs, des tables hautes, des Lego, des ampoules, des fils électriques, de vieux téléphones… Tout y est possible ou presque : travailler, écrire sur les murs, préparer des repas chauds ou piquer un petit somme. Car on s’y enferme jusqu’à une semaine entière. « Nous voulions créer un vrai décalage et une coupure avec le reste de l’entreprise », explique Fabrice Poussière, aujourd’hui responsable du Creativ’Lab. Les chercheurs ne reçoivent plus ni coups de fil ni e-mails. Et les seules ouvertures sur l’extérieur sont de petits hublots.
« Certaines entreprises vont jusqu’à désactiver la borne Wi-Fi la plus proche ou à installer un brouilleur d’ondes afin d’éviter que les téléphones et les e-mails ne viennent parasiter la réflexion », affirme Catherine Gall, directrice recherche et prospective chez Steelcase. A Barcelone, l’opérateur Telefónica a lui aussi opté pour ce genre de procédé. « Au siège, les équipes de R&D peuvent travailler dans une salle nommée Iceberg, dont la décoration évoque la banquise, ou dans une autre, toute verte, imitant la nature », raconte Catherine Gall.
Effet à durée limitée. Mais reste-t-on vraiment créatif toute une semaine à huis clos ? « Six jours constituent une limite, admet Philippe Auriol, consultant chez Safran et Co. On finit par apprivoiser les lieux, par y avoir ses habitudes. Et l’effet stimulant s’essouffle. La créativité se nourrit aussi du contact avec le monde extérieur. »
Céline Deval
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